un triptyque sensible en 2024
Un édito de Marina Lafay, présidente de Tempo
C’était il y a une trentaine d’années au Nord de l’Italie : des travailleuses lassées de courir après le temps pour au final arriver toujours trop tard (et à la sortie des écoles, et après la fermeture des services essentiels…) se mobilisent. Et de là naissent les politiques temporelles et des lois en Italie créant des Bureaux du temps dans les collectivités.
De cela nous devons être reconnaissant.es pour les politiques temporelles en général, mais aussi pour les droits des femmes. De cela nous devons aussi nous inspirer, car si progrès il y a eu en certains points, la question du temps et du genre, fondatrice des “times policies”, reste encore un point sensible à bien des égards.
Quelques illustrations pour en témoigner, que l’on pourrait penser presque anecdotiques si elles ne faisaient écho à des situations bien documentées par des chercheur.es :
– La sortie des écoles : qualifiée encore souvent comme “heure des mamans”
– Une femme politicienne me disait récemment en substance : “je suis vraiment épanouie car comme mes enfants sont grands et partis de la maison, je peux m’investir à fond dans mes fonctions politiques. Je n’aurais jamais pu faire de politique avant”
– On se souvient tous de Ségolène Royal candidate en 2007 à la présidentielle subissant la remarque suivante “mais qui va garder les enfants ?”, soulignant une incompatibilité entre la parentalité et la vie politique, du moins pour les femmes.
Et en 2024 où en sommes nous?
Lors des dernières élections municipales, seuls 19,8 % des maires sont des femmes.
A l’heure où j’écris, la Maire de Poitiers Léonore Moncond’huy a annoncé sa grossesse et médiatise le vide juridique français qui fait qu’elle n’a pas le droit à des congés maternité. Un impensé fondamental.
A l’heure où j’écris, Djénéba, quelques jours après que le premier ministre Attal ait évoqué la question du travail fractionné, témoigne de son quotidien dans le Parisien. Elle prend le train vers 5h du matin, rentre chez elle après 21 h, 5 h de sommeil et plus de 5 h dans les transports. Elle est femme de ménage. Pour elle comme d’autres, ceux et celles qu’on a appelé les “invisibles” ou “les premiers de cordées” durant la crise covid — des femmes en majorité — il y a une impossibilité factuelle à s’engager et même ne serait qu’à disposer d’un temps pour soi, par manque de temps.
Il est plus que temps de remettre le débat sur temps et engagement des femmes — de toutes les femmes — au cœur de nos réflexions. Les femmes italiennes avaient su ouvrir le débat jusque dans les partis, les syndicats, les associations de l’époque, dans la recherche, les centres de décisions.
Rouvrons leur archives et surtout remettons le sujet à nos ordres du jour pour apporter des solutions concrètes et palpables. Souvenons nous également dans le même temps de la célèbre phrase attribuée à Simone de Beauvoir : n’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. Ces droits ne sont jamais acquis. Vous devrez rester vigilantes votre vie durant.
En ce 8 mars, je l’appelle de mes vœux et le réseau Tempo Territorial saura être au RDV pour apporter son appui en ce sens. Car c’est là une nécessité vitale pour la pleine et effective vie démocratique aujourd’hui.
Marina Lafay
retrouvez l’info dans cette newsletter du 8 mars,
ou le temps des femmes est mis à l’honneur, dans l’édito de notre Présidente, Marina Lafay, sur le sujet de l’engagement des femmes, encore compliqué en 2024, mais aussi avec quelques données issues de l’Institut Européen de l’égalité des genres, et d’autres sujets sur la toujours inégale répartition dans les taches quotidiennes.
Bonne lecture de la news 8mars ICI